Femmes et filles en situation de handicap face aux VBG : comprendre ce double combat
Femmes et filles en situation de handicap face aux VBG : comprendre ce double combat
Les femmes et filles en situation de handicap vivent une réalité souvent ignorée : elles subissent à la fois les violences basées sur le genre et les discriminations liées au handicap. Ce double combat menace leur sécurité, leur bien-être et leur droit à l’épanouissement.
Dans le monde, environ 1 femme sur 3 a subi une forme de violence physique ou sexuelle de la part d’un partenaire intime ou non partenaire. Pour les femmes et filles en situation de handicap, ces chiffres s’élèvent nettement : elles sont au moins 2 à 3 fois plus susceptibles que les femmes sans handicap de subir des VBG. Cette étude de Humanity Inclusion estime qu’elles peuvent être jusqu’à 10 fois plus exposées à la violence sexuelle.
Vulnérabilité accrue liée au handicap
Le handicap crée des dépendances accrues (soins, aides, mobilité), de l’isolement social, des barrières à l’accès à l’information, à la justice, aux services de santé. Ces facteurs renforcent la vulnérabilité des femmes en situation de handicap face aux VBG.
Le Rapport mondial sur l’équité en santé indique que les femmes et enfants en situation de handicap « sont à haut risque de violence », et dans certains contextes de conflit, jusqu’à 85 % des femmes handicapées ont rapporté des violences physiques ou sexuelles. Ces données montrent la réalité de ce double combat : non seulement subir la violence, mais aussi faire face à des réactions insuffisantes des systèmes de protection.
Conséquences du double combat
Les femmes et filles en situation de handicap qui subissent des violences basées sur le genre affrontent un enchaînement de souffrances physiques, psychologiques et sociales. Les traumatismes qu’elles endurent s’ajoutent aux difficultés quotidiennes liées à leur handicap, entraînant un profond sentiment d’insécurité et un risque accru de revictimisassions. L’accès aux soins, à la rééducation ou au soutien psychologique est souvent limité, en raison du manque de structures adaptées et de la stigmatisation persistante.
Sur le plan socioéconomique, la violence a des répercussions directes sur leur autonomie. Beaucoup sont privées d’éducation, d’emploi ou de ressources, ce qui renforce leur dépendance et les enferme dans un cercle de pauvreté et d’exclusion. Selon UN Women, les femmes handicapées sont deux fois plus susceptibles que les autres femmes de subir des violences physiques ou sexuelles, et certaines études évoquent même des taux beaucoup plus élevés dans les contextes de crise ou de conflit.
Enfin, sur le plan politique et juridique, ces femmes demeurent trop souvent invisibles. Leurs réalités sont rarement prises en compte dans les politiques de prévention ou de protection, et le manque de données spécifiques empêche une action publique efficace. Cette invisibilité institutionnelle prolonge leur marginalisation et freine toute avancée vers une véritable égalité des droits.
Des pistes pour le changement
• Adaptation des programmes de prévention
Les programmes de lutte contre les VBG doivent intégrer explicitement les femmes et filles en situation de handicap : accessibilité, moyens de communication adaptés, services de soutien spécialisés.
• Renforcement de la protection et de l’accès à la justice
Il est essentiel d’établir des cadres légaux qui reconnaissent les formes de violence spécifiques liées au handicap (abandon, retrait d’aides, accès aux prothèses, etc.). Les états doivent garantir l’accès à la justice, même pour les personnes en situation de handicap.
• Sensibilisation et changement des mentalités
Mobiliser la société sur la notion de double vulnérabilité : « handicap + genre ». Message mobilisateur : « Soyons solidaires pour elles ». Encourager les communautés à soutenir l’autonomie et la dignité des femmes handicapées.
• Collecte de données et recherche
Améliorer la collecte de données désagrégées (selon le genre et le handicap) pour mieux comprendre la situation et concevoir des programmes efficaces. L’Organisation mondiale de la santé souligne que ces femmes sont sous représentées dans les enquêtes sur la violence.
Les femmes et filles en situation de handicap mènent un double combat : celui de se protéger contre les violences basées sur le genre, et celui de vivre en dignité malgré les obstacles liés au handicap. Elles méritent non seulement notre attention, mais une action adaptée et déterminée.
Abdoulsalam Dicko